1952. L'asile de St. Dymphna accueille de nombreux patients, meurtriers, malades ou même sorcières de toutes origines. Et vous, pourquoi êtes-vous ici ?
"Le vent se lève - Il faut tenter de vivre" | Vesna
Invité
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Jeu 14 Avr - 16:58
Présentation
She flies by her own wings - Ona leti svojim vlastitim krilima
Identité
Nom(s)
Kovačević
Prénom(s)
Vesna
Date/Lieu de naissance
25/06/1921 à Knin, Dalmatie, Royaume des Serbes, Croates et des Slovènes
Sexe
F
Ethnicité
Caucasien (slavo illyrien)
Cheveux
Brune
Yeux
Marron-gris
Taille
1m64
Poids
53 kg
Dossier médical
Pathologies mentales
Pratique des arts occultes, stress post traumatique, fausse couche. Troubles de la personnalité.
Autres pathologies
Cardiaque, claustrophobe
Précautions de traitement
Ne pas enfermer dans un endroit trop exigu seule trop longtemps.
Arrivée à St. Dymphna
Elle posa sur la table le symbole de Perun qu’elle portait autour du cou. L’insigne païen fut ramassé, puis brûlé comme l’usage le demandait. Ses yeux d’un certain gris ne se baissaient pas. Elle avait obéi à l’injonction. On avait convenu que l’on pouvait lui laisser sa croix lorsqu’on avait pu statuer que l’objet n’avait aucun lien maléfique, qu’il était simplement à usage religieux.
- Montrez-moi vos tatouages.
Elle remonta ses manches sans parler davantage, puis ouvrit le col de sa robe. Partout, sur ses bras, au niveau de sa poitrine figurait ses symboles que l’on ne connaissait pas. Derrière, une nonne se signa, croyant voir la une manifestation hautement satanique. La slave ne disait toujours rien, laissant cela à l’examen. Personne ne pourrait lui retirer ce qui était inscrit dans sa chair. Ces tatouages elle les portait depuis ses 9 ans, en 1930. Sa mère, originaire d’Herzégovine avait dans sa famille la tradition de tatouer tous les membres avec des symboles traditionnels de protections. Cela se faisait souvent chez les Croates d’Herzégovine et de cette région de Dalmatie. Cela servait à protéger les fils de se faire enlever comme janissaires et les femmes d’être emmenée par les turcs pour les servir.
- Que sont ces tatouages pour vous ? - Un héritage. Si cela peut vous rassurer ils sont issus de la tradition catholique. Nos ancêtres illyriens se tatouaient ainsi.
Vesna tenait son regard, fière de cette partie de son patrimoine. Ce patrimoine qui lui avait causé tant de problèmes avec l’arrivée des Partisans au pouvoir dans son pays. Les communismes n’aiment ni les signes religieux, ni ce qui pouvait distinguer un peuple d’un autre dans cette nouvelle Yougoslavie. Leurs persécutions lui avaient fait perde l’enfant qu’elle portait. Du moins à ce qu’elle pensait. Elle mettait sa fausse couche sur leur compte, eux qui avaient assassiné son mari, un ancien oustachi rangé. On l’autorisa à cacher de nouveau cela.
On feuilleta de nouveau son dossier. Il était complet, bien renseigné. Elle avait émigré aux Etats Unis juste après la perte de son enfant et menait une vie qui était riche en contact. Elle donnait des cours de serbo croate pour gagner sa vie et occasionnellement continuait son ancienne occupation dans la couture, mais si la Yougoslavie pouvait avoir besoin de ce genre de métier, les Etats Unis industrialisés ne lui permettait pas de vivre de cette profession. On la savait religieuse assidue, mais ses tatouages avaient rapidement intrigué.
- Ce dossier me semble complet. Sauf concernant la période où vous viviez dans l’Etat Indépendant de Croatie. Elle se mordit la lèvre doucement. Ce nom faisait remonter des souvenirs peu agréables. Ante Pavelic, le nazisme, son pays divisé en de multiples camps sans morale, les serbes de son village, qu’elle côtoyait jadis massacrés comme des animaux. Une larme roula alors qu’elle désirait se montrer imperturbable. La croate ouvrit la bouche pour la refermer, composer ce qu’elle désirait dire dans sa tête avant de finalement s’exprimer. - J’ai caché des filles serbes chez moi pendant la guerre. L’Etat oustachi cherchait à tous les exterminer vous savez… En on nous as dénoncé, parce qu’ils savaient que même si j’avais des pouvoirs qu’ils craignaient, je ne pourrais rien faire contre eux. - Ils ? Eux ? - Des gens de Knin qui convoitaient le cheptel que mon père refusait de leur vendre. Les oustachis. - Continuez je vous prie. - Ils nous ont emmenés, tous. En enfer. Si ce n’était pas l’enfer alors je n’imagine pas que peut être l’enfer. On appelait ça Jasenovac. Là-bas, ils tuaient des juifs, des serbes, des tsiganes, et même les croates s’opposant à eux de la manière la plus barbare possible. J’y suis rentrée en 42. J’avais 21 ans alors. On travaillait, on mourrait. Il y’avait le diable, le diable en personne, il se vantait d’avoir égorgé 1 000 serbes et juifs en une nuit a couteau.
Les larmes se firent plus abondantes, sa voix était prise. On la regarda dans sa détresse, une détresse emplie de noms slaves que seule elle comprenait ici. Ses explications ne rappelaient rien. Si Auschwitz parlait à tous, personne ne connaissait le camp de la mort le plus meurtrier des Balkans. On attendit qu’elle soit de nouveau apte à parler. Elle serrait les dents, se sentant humiliée d’être regardée ainsi, au cœur de sa faiblesse. Ici, même en obéissant, on ne lui voudrait pas du bien. Vesna se ressaisit, releva la tête.
- Un garde oustachi s’est épris de moi et moi de lui. Il a eu la patience de régularisé la situation, mais pour cela… J’ai dû tuer un homme pour qu’il soit promu à sa place.
Elle déglutit faiblement. Dans son esprit elle avait remisé ces souvenirs, elle ne pouvait en parler sans douloureuse crise de larmes. La croate n’avait tué qu’une unique fois, mais cela la hantait. Sa moue fut visible.
- Puis je me suis mariée avec celui qui m’avait sauvé de cet enfer. Vedran Jelkovic. Aujourd’hui il est mort.
Elle ne désirait plus rien ajouter là-dessus. Cela se sentait assez pour passer à la dernière question qu’on lui préparait.
- Vous qui ne niez pas être une sorcière, pouvez-vous m’expliquer précisément ce qu’il en est pour vous ? - Ma mère m’a transmis une partie de son savoir, mais chez nous, la plupart du temps, sauf peut-être pour la plus célèbre des sorcières en Croatie, la reine Noire, nous pactisons avec des créatures pour obtenir leur pouvoir. C’est donc ce que j’ai fait.
Elle n’expliqua rien de plus. Sur les terres Croates, il y avait des vilas, des fées, mais complètement détachées de l’idée commune. C’était de belles femmes, des esprits pouvant être redoutables si traités avec irrespect. Le nom Vesna désignait celui des déesses mineures, des esprits du printemps. C’était presque lié d’une façon ou d’une autre. La Vila avec laquelle elle avait pactisé pouvait dans une moindre mesure faire se lever le vent. C’était ainsi que Vesna avait acquis cette maitrise de l’élément, bien que cela se manifeste plus sous la forme de courant d’air lorsqu’elle se trouvait en intérieur. Inutile de penser qu’elle pouvait voler, elle ne pouvait qu’invoquer le vent et infléchir sa direction…
- Bien, cela me semble en règle. Vous serez prise en charge dans l’immédiat.
Elle passa une main dans ses cheveux courts puis acquiesça, consciente que la suite de sa vie ne sera pas d’une grande facilité….